RAY CHARLES – AT THE OLYMPIA

Ce qu’il y a de bien avec l’industrie du disque, c’est qu’elle est Ô combien prévisible ! Ainsi lors de l’annonce du décès du Genius, il était facilement envisageable de voir fleurir pour Noël tout un lot d’articles discographiques, vidéo, bibliographiques, et autres compils sans queue ni tête. Bref, Noël s’annonçait crinière blanche, lunettes noires et pub Citroën, et ce début d’année 2005 prolonge cette excitation par la sortie du film Ray.

Parmi cette euphorie entrain à faire sonner les dollars, on retiendra pour commencer l’album Genius loves company, dernier album enregistré par le génie de la soul, récompensé par un Grammy (parmi les 8 récemment attribués à Ray Charles), et qui regroupe une série de duos bien ficelés parfois un peu « variet’ grand public de qualité », mais plein d’émotions et de feeling sur certains titres (Fever, Sorry seems to be the hardest word, Hey Girl, Heaven help us all...).

Par Vince

   
   

 

   
   

Au rayon émotion et feeling, ce n’est rien à coté de ce live enregistré en 2000 à l’Olympia. D’accord il s’agit d’un DVD : dans la rubrique disque du mois, ça fait tache, mais la version limitée de ce DVD fournit en « bonus » la version CD du concert, qui n’a que peu de choses à envier au DVD un peu statique (et oui Ray Charles c’est pas Axl Rose !).

Bien entendu, cet enregistrement date de novembre 2000, et pour avoir vu Ray Charles la même année en juillet à Cognac, on ne peut pas dire qu’il y avait de grandes choses à attendre de ce concert parisien. Mais cela eut été le cas si le transport aérien portugais ne s’était pas mis en grève au même moment ! En effet, à quelques heures du début de ce concert, seuls Ray Charles ainsi que sa rythmique (basse/guitare/batterie) ont pu rejoindre notre capitale. L’encombrant Big Band et les Raelettes sont coincés au bord de la mer, et Ray Charles se lance sur scène accompagné de son trio. Le résultat : un concert de 71 min avec Brother Ray omniprésent tant au piano qu’au chant, qui prouve avec simplicité et sincérité, un talent que l’on ne croyait plus retrouver chez cet artiste.

Réarrangés à la dernière minute pour un trio, les morceaux interprétés s’articulent entre jazz et l’un de ses premiers amours : le blues. D’inévitables succès sont de la partie : Hallelujah I love her so, Georgia on my mind ou What’d I say, mais ce qui est essentiel à ce concert, c’est la liberté et la place à l’impro que laissent la formule en quatuor. Ainsi le travail piano du maître prend une toute autre mesure (ça change forcément quand on n’a pas 20 musiciens derrière), de même que l’improvisation et la direction du concert. Ray Charles se promène sur ses touches, s’éclate au chant et prouve qu’à 70 ans il est encore le Genius.

La section rythmique tient largement sa place d’accompagnateur de haut rang, même si le blues en smoking, c’est pas toujours évident, même quand on connaît son biniou…

Troisième acteur indispensable de ce concert : le public ! Sans doute un peu surpris de ne trouver qu’un piano sur la scène du mythique théâtre parisien, celui-ci assiste médusé à la prestation du génie retrouvé, et n’hésite pas à entrer en transe sur I’ve got a woman ou remplacer sans démériter les Raelettes sur What’d I say ! Ray Charles le sent et s’en amuse (Just for a Thrill, It had to be you…). Un grand concert unique qui réconciliera tout amateur du Genius avec ses dernières prestations « live » fort peu convaincantes.

Ce soir là, Ray Charles et son trio « ont fait ce qu’ils ont pu » ! C’est Ray qui le dit !

Ray Charles – At the Olympia – XIII bis records 2004